Les vertus de la démédicalisation de l'accouchement (y compris pour celles qui continueront à aller à l'hôpital parce qu'elles en ont besoin)<!-- --> | Atlantico.fr
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Une femme enceinte se relaxant dans une piscine.
Une femme enceinte se relaxant dans une piscine.
©Reuters

Petite révolution

Jeudi, les députés ont examiné une loi pour ouvrir l'expérimentation des maisons de naissance. Ces "maisons" offrent aux futures mamans la possibilité d'accoucher dans un cadre moins médicalisé.

Atlantico : Les députés ont examiné ce jeudi une loi visant à autoriser l'expérimentation des maisons de naissance, qui permettent aux femmes d'accoucher sans être hospitalisées. Cette méthode va-t-elle permettre de désengorger les maternités ?

Sylvain Mimoun : Les maisons de naissance vont très certainement permettre de désengorger les maternités. Cela fait partie d’une recherche d’autres moyens pour désengorger les hôpitaux tout en faisant en sorte que l’intérêt des mamans et des enfants soit assuré. De fait, les femmes qui accoucheront hors de l’hôpital ne seront pas dans ces maternités, sauf en cas de complication, évidemment.

Chantal Ducroux-Schouwey : Certainement un peu mais l’expérimentation des maisons de naissance n’est pas faite pour désengorger les maternités, ce n’est pas le but. L’objectif est de proposer un choix plus large pour les parents. Aujourd’hui, ils demandent moins de médicalisation. Or dans les maternités dites classiques, il y a beaucoup de protocoles. Cette médicalisation moins importante, c’est ce qu’ils pourraient trouver dans les maisons de naissance. Cette demande n’est d’ailleurs pas récente, elle est attendue depuis 20 ans, et augmente d’année en année.

Si ces maisons de naissance ne permettent pas vraiment de désengorger les maternités, quel est leur intérêt ?

Chantal Ducroux-Schouwey :C’est d’offrir un choix plus important pour accoucher, comme c’est le cas dans beaucoup de pays : aux États-Unis, en Allemagne, en Suisse, en Grande-Bretagne… Et puis il y a aussi l’accompagnement global : une relation de confiance se noue entre la sage-femme et les parents. Cette relation va assurer une sécurité durant l’accouchement, ce qu’on ne retrouve pas forcément dans les maternités où la future maman est prise en charge par plusieurs personne et ne connaît pas la sage-femme,  voire les sage-femmes si l’accouchement dure longtemps. Ce n'est que dans les maternités privées que la maman peut connaître avant la naissance le personnel soignant.

Peut-on imaginer, à terme, que sauf contre-indication médicale, ces accouchements hors de l’hôpital concerneront toutes les femmes qui déserteront ainsi les maternités ?

Chantal Ducroux-Schouwey : Non, car toutes les femmes ne peuvent pas accoucher dans les maisons de naissance. Celles qui attendent des jumeaux comme celles qui ont des problèmes importants, une mauvaise santé ou qui ont besoin d’une observation particulière  seront toujours aiguillées vers des maternités.

Sylvain Mimoun : Il y aura des protocoles à suivre et à respecter. Ainsi, une maison de naissance conviendra parfaitement à  une femme qui a déjà accouché sans problème. En revanche, celles qui ont des complications seront à surveiller comme le lait sur le feu. Ces maisons ne seront donc pas pour elles.

L’accouchement hors de l’hôpital est-il sans risque pour la mère et pour l’enfant ?

Sylvain Mimoun : C’est une question simple et la réponse est compliquée. Beaucoup de femmes accouchent seules et sans histoires. Quand elles seront dans ces maisons de naissance, il n’y a pas de raison qu’il y ait de souci. Le problème, c’est quand il y a des complications. Les femmes qui accoucheront dans ces maisons de naissance seront en contact avec des maternités et en cas de problème, ce sont ces dernières qui prendront la main. C'est tout l’intérêt de cette expérimentation : on va pouvoir voir ce qui est à surveiller de près.

Chantal Ducroux-Schouwey : Différentes études montrent que les maisons de naissance sont aussi sûres que les maternités, si la grossesse se passe bien, évidemment. Nous avons en France les meilleures sages-femmes du monde : elles sont tout à fait capable de suivre une femme du début à la fin de la grossesse et de passer la main à un obstétricien en cas de complications. Mais dans tous les cas, le risque zéro n’existe pas, qu’on soit en maternité ou en maison de naissance.

L’accouchement dans des maisons de naissance représente-il également une économie pour les patients et pour la collectivité ?

Sylvain Mimoun : Pour la collectivité, cela peut aider à ce que les choses se passent plus facilement, de manière plus aisée et moins chère. Le problème est l’argent, comme toujours. Si les maternités sont engorgées, c’est avant tout pour des raisons financières et les maternités coûtent cher. Et pour la maman aussi, cela est plus économique d’accoucher dans ces maisons de naissance.

Chantal Ducroux-Schouwey : En maison de naissance, il n’y a pas d’hospitalisation, c’est déjà un coût en moins. Il y aura moins de médicalisation également, donc moins de dépenses. Par exemple, en maternité, pour lutter contre la douleur, on va souvent privilégier la péridurale alors qu’il y a d’autres moyens, moins médicamenteux, comme des ballons que l’on place sous la maman, des massages, etc., qu’on pourra typiquement trouver dans les maisons de naissances.

Est-ce que d’une manière générale, l’accouchement est trop médicalisé de nos jours ?

Chantal Ducroux-Schouwey : Oui, même les professionnels le reconnaissent. Nous avons en France une médicalisation de l’accouchement. Les chiffres péri-nataux ne sont pas bons, le nombre de césariennes, d’épisiotomies est plus élevé que dans les autres pays européens. Il faut se positionner différemment par rapport  la naissance. Ce n’est pas simplement un acte médical mais aussi et avant tout un acte physiologique.

Propos recueillis par Sylvain Chazot 

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