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Il n’existe en France aucune volonté réelle des hommes politiques et des administrations de réduire les dépenses publiques.
Il n’existe en France aucune volonté réelle des hommes politiques et des administrations de réduire les dépenses publiques.
©Bernadett Szabo / Reuters

Parler et mentir

Depuis 40 ans, les hausses de salaires des fonctionnaires et les créations de postes ont comme contrepartie un accroissement de la dette publique.

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi est professeur affilié de Finance à l’université Paris-Dauphine.

Il est auteur ou co-auteur de plus d’une dizaine d’ouvrages dédié à la finance. Il est notamment l'auteur de Les paradis fiscaux (Sefi, mai 2011) et de plsuieurs ouvrages sur les hedge funds.

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François Hollande avait promis d’être un président ayant une gestion raisonnable des Finances Publiques, force est de constater qu’on peut être circonspect sur les mesures prises et inquiet sur les mesures à venir. 

1)     Sur le front de la dette brute cela irait mieux ?  

Commençons par des rappels de terminologie :

-         La dette brute est la dette des administrations publiques c’est la somme des dettes de l’Etat (son passif) sans tenir compte d’éléments d’actifs, la dette au sens de Maastricht est une dette brute.

-        La dette nette consiste à déduire de la dette brute les actifs de toute sorte détenus par l’Etat, elle mesure mieux l’endettement réel de l’Etat.  cres sans tenir comptes des avoirs de l’Etat. Ces deux première notions sont une dette explicite et ont comme contrepartie notamment des emprunt (en France les OAT gérées par l’Agence France Trésor).

-        Le principe de la dette implicite date de 1991 à l’initiative de trois économistes américains (Auerbach, Gokhale et Kotlikoff) qui ont été les premiers à souligné qu’une vision réelle de la dette étatique devrait comprendre les engagements de l’Etat (retraite, dépenses de santé …). En 2005, l’INSEE mesurait déjà la dette explicite à 6 500 milliards d’euros soit 390% du PIB. Ce chiffre correspond plus à la réalité mais la bureaucratie n’aime pas le concept de dette publique implicite car il va à l’encontre de ses intérêts puisqu’il pourrait inciter la population à demander à l’Etat de mettre fin au grand gaspillage et à l’opacité.  

-        Il n’existe aucune amélioration du niveau de la dette publique qui continue à augmenter du fait des déficits, en fait ce que l’on présente comme une amélioration c’est par rapport au plus fort de la crise économique un ralentissement de la vitesse de la hausse de la dette publique grâce notamment à des taux d’intérêts historiquement bas (compte tenu de la charge d’intérêts on imagine aisément l’impact d’un retournement à la hausse de ceux-ci).

Il n’existe en France aucune volonté réelle des hommes politiques et des administrations de réduire les dépenses publiques. La raison est simple il existe un évident conflit d’intérêt, depuis 40 ans les hausses de salaires des fonctionnaires et les créations de postes ont comme contrepartie un accroissement de la dette publique. Croire discerner l’intérêt général là ou il s’agit de purs intérêts catégoriels, pour parler comme Friedrich Von Hayek « c’est confier le pot decrème à la garde du chat ». Saluons l’unanimisme récent du parlement pour refuser d’être contrôlé par la Cour des Comptes (au nom « de la séparation des pouvoirs ») évènement inquiétant et insuffisamment relevé. Pour prendre le tragique avec humour rappelons la phrase célèbre de Raymond Devos : « Parlement : mot étrange formé des deux verbes. « parler » et « mentir ».

Autre point noir récurrent, en France le déficit est un mauvais déficit (il n’y a quasiment que des dépenses de fonctionnement et pas de dépenses d’investissement), il est donc vain de rêver à un impact positif sur la croissance et sur l’emploi.

2)     Sur le front de la dette nette un dangereux enfumage en vue   

                          Les sources de l’INSEE montrent qu’en France que la dette nette augmente tendanciellement plus vite que la dette brute :

             Le gouvernement a annoncé des mesures de cessions d’actions qui vont aggraver la situation actuelle car elles sont constitutives d’une double erreur :

Un très mauvais timing pour céder les participations détenues par l’Etat dans des sociétés cotées :

A la mi-2013 les choses ont encore évolué défavorablement par rapport aux données du graphique de l’INSEE.

                                    Une mauvaise affectation des produits de la cession puisque celui-ci qui aurait du être affecté au remboursement de la dette publique pour ne pas voir augmenter la dette nette, servir en fait à financer des dépenses d’investissement. La gauche qui avait beaucoup critiqué le grand emprunt ne fait-elle pas pareil ? Elle entend bien financer un programme de dépenses d’investissement en augmentant la dette nette, même si la dette brute au sens de Maastricht ne sera pas affectée. Ce tour de passe passe est certes digne d’Houdini, mais la réalité est cruelle les choses s’aggravent, sans aucune perspective de retour à la croissance, de l’emploi et donc du redressement des déficits abyssaux.

                 Pour conclure soulignons un fait insuffisamment souligné une dette publique excessive constitue une inéquité inter-générationnelle, derrière ce jargon technocratique il y a un phénomène simple : on vole à notre profit les générations futures, nos enfants devront rembourser le fruit de notre gestion. En d’autres termes, la fuite en avant continue pour l’instant en tout cas …   Méditons la célèbre phrase de Frédéric Bastiat « Chacun veut vivre aux frais de l’Etat. Mais tout le monde oublie que l’Etat vit aux frais de chacun ».  

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