Fécondité humaine : faut-il vraiment s’inquiéter du déclin de la qualité du sperme ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une nouvelle étude ravive les craintes que nous soyons biologiquement condamnés à l'extinction face à une diminution de la qualité des spermatozoÏdes.
Une nouvelle étude ravive les craintes que nous soyons biologiquement condamnés à l'extinction face à une diminution de la qualité des spermatozoÏdes.
©Flickr

Survie de l'humanité ?

A en croire certaines études, c’est la capacité même de l’humanité à se reproduire sans assistance qui serait en cause. La réalité scientifique est plus complexe.

Alain Héril

Alain Héril

Alain Héril est psychothérapeute et sexothérapeute depuis 25 ans.

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Atlantico : Une nouvelle étude sur le nombre de spermatozoïdes émerge et ravive les craintes que nous soyons biologiquement condamnés à l'extinction. Dès 1992, une étude fondamentale, publiée dans le British Medical Journal, concluait que le nombre moyen de spermatozoïdes était passé de 113 millions par millilitre au début du XXe siècle à 66 millions par millilitre dans les années 1990. Alors que la planète comptait environ 1,6 milliard d’habitants en 1900, mais plus de 6 milliards en 2000, pourquoi la communauté scientifique s’est-elle inquiétée de la perte de qualité du sperme ?

Alain Héril : On ne peut qu'enregistrer les conclusions de cette étude. Mais il me semble qu'il faut y amener beaucoup de prudence. Le nombre d'habitants sur notre planète continue à être en expansion ce qui semble contredire les résultats de cette enquête. Et puis, de quoi parle-t-on? La perte de la qualité du sperme ne veut pas dire disparition totale des spermatozoïdes.

La scientifique Shanna Sawn expliquait dans son livre Count Down que le phénomène « menace la survie de l'humanité » et qu'en extrapolant son étude, le nombre de spermatozoïdes pourrait atteindre zéro en 2045. Quelles sont les causes évoquées par ceux qui pensent que nous courons à la catastrophe ?

L'étude porte sur un faible nombre de personnes prises dans l'échantillonnage et n'est pas suffisamment diversifiée au niveau des âges et des catégories socio-professionnelles étudiées. Il me semble qu'il y a une course au catastrophisme qui n'est pas suffisamment étayée et qui n'a de sens que par son côté spectaculaire. Je ne cherche pas à minimiser les résultats mais à les remettre en perspective en espérant des données plus poussées et réparties sur un temps plus long. Le sujet est sensible et potentiellement inquiétant. Il réclame donc une vigilance scientifique plus élaborée.

Selon vous, est-ce une inquiétude véritablement fondée sur des faits ?

Dans les faits on peut se poser des questions sur l'influence de l'environnement et les perturbateurs endocriniens, même s'interroger sur la résonance des ondes sur la qualité du sperme. Pour l'instant ce ne sont que des hypothèses. Si celles-ci s'avèrent justes il serait bien d'envisager des pistes de solutions ce qui paraît être plus dynamique et salvateur que de simples constats. On pourrait aussi interroger la baisse des taux de testostérone (qui participe à la fabrication des spermatozoïdes) et en trouver les sources. Peut-être aussi faire des liens avec notre alimentation moderne appauvrie en fruits, légumes et poissons. Et puis il serait peut-être intéressant d'interroger les notions de psychologie comportementale. Y a-t-il un lien entre la crise de la masculinité actuelle et cette problématique? Y aurait-il aussi une crise de la paternité? A partir d'une question aussi importante que la possible disparition de de l'humanité toutes les composantes explicatives se doivent d'être étudiées. L'être humain n'est pas simplement une machine hormonale et endocrinienne.

Ne font-ils pas l’amalgame entre la fertilité et la fécondité ?

Oui, il y a un amalgame certain entre fertilité et fécondité. Selon les définitions, la fertilité est la capacité à produire une descendance vitale et abondante et la fécondité est la capacité à se reproduire. Certes les deux termes sont semblables mais on peut être fécond sans être excessivement fertile. Une baisse de la qualité du sperme ne laisse pas entendre une totale disparition de celui-ci. Rappelons qu'il suffit d'un spermatozoïde valide pour qu'une fécondation ait lieu. Cette étude parle de la perte de qualité du sperme mais peut-être faudrait-il la corréler avec une étude sur la fécondité féminine.

Pourquoi ne disposons-nous pas de données fiables sur la perte de qualité du sperme ? 

A mon sens, les premiers résultats étant tellement surprenants que cela a bloqué l'envie d'une recherche plus approfondie. Il nous faut attendre des investigations plus approfondies et inscrites dans un programme scientifique plus rigoureux avant d'en tirer des conclusions quasi définitives. Je pense que nous sommes juste à l'orée d'un début de recherche. Et comme souvent la suite peut amener à des résultats radicalement différents de ceux que nous connaissons actuellement. Avant de s'installer dans une peur et une panique de cet ordre il faudrait avoir un recul scientifiquement nécessaire.

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