Face au terrorisme, les démocraties sont-elles des régimes comme les autres ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Face au terrorisme, les démocraties sont-elles des régimes comme les autres ?
©DR

Bonnes feuilles

Dans son livre "Qu'est ce que le terrorisme" publié aux éditions Vrin, Cyrille Bret, ancien élève de l'ENS et de l'ENA, aujourd'hui professeur de philosophie à Science Po aborde la question du terrorisme à travers le prisme de la philosophie. Se faisant, il permet au lecteur de récupérer la hauteur nécessaire pour aborder un sujet qui chamboule notre ordre et nos valeurs démocratiques. Une oeuvre de salubrité publique. Extrait 2/2.

Cyrille Bret

Cyrille Bret

Cyrille Bret enseigne à Sciences Po Paris.

Voir la bio »

En tant que cibles du terrorisme, les démocraties présentent des vulnérabilités supplémentaires par rapport aux États policiers : pour préparer attentats et infiltrations, sabotages et subversions, les groupes terroristes exploitent des libertés que les démocraties protègent : liberté de mouvement, d’expression, d’association, de culte, liberté de la presse, etc. Les démocraties sont-elles condamnées à être d’éternelles victimes du terrorisme en raison de cette dissymétrie avec les terroristes comme avec les régimes autoritaires ? Ce serait négliger les ressources des démocraties : elles n’abordent pas la lutte contre le terrorisme parfaitement démunies. Ce serait aussi passer sous silence les tactiques de type terroriste que certaines démocraties ont adoptées. En effet, plusieurs démocraties ont elles-mêmes recours à des techniques s’apparentant au terrorisme d’État, dans des circonstances jugées exceptionnelles 1 : durant la Seconde Guerre Mondiale, les Alliés ont délibérément bombardé des populations civiles allemandes pour les démoraliser et faire ainsi pression sur le régime nazi, notamment à Dresde ; durant la campagne Global War on Terror, les États-Unis ont utilisé explicitement des outils de lutte anti-terroriste incompatibles avec les principes démocratiques et proches du terrorisme d’État : détentions indé¿ nies, « interrogatoires coercitifs » et torture caractérisée, collecte de données de masse, exécutions extrajudiciaires notamment par des drones 2, etc. C’est ce qui fait déclarer à plusieurs philosophes que le premier terroriste est l’État et que le terrorisme infraétatique n’est qu’une réaction du faible au fort. Éternelles victimes ou États oppressifs en puissance, les démocraties sont constamment mises en accusation, soit pour leur inefficacité supposée, soit pour leur hypocrisie soupçonnée. Elles sont en butte à des difficultés bien particulières. Première difficulté : le risque de reniement. Plusieurs tactiques terroristes intègrent les réactions de l’antiterrorisme dans l’essor de la terreur. Elles poussent les démocraties à des représailles massives pour les discréditer et justifier de nouveaux attentats.

Le but est alors d’inciter les démocraties à verser dans le terrorisme d’État. Deuxième difficulté : la tentation de l’état d’exception. Sous la pression de l’électorat, des médias et des services de sécurité, les démocraties peuvent être prises dans la « pente glissante » vers un état d’urgence sans ¿ n. Au nom de la liberté, elles instaureraient graduellement des régimes policiers.

Lien vers la boutique Amazon : ici

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !