Emmanuel Macron veut faire une autre réforme des retraites que celle prévue initialement. Oui mais laquelle ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une forte mobilisation avait eu lieu fin 2019 contre le projet de réforme des retraites.
Une forte mobilisation avait eu lieu fin 2019 contre le projet de réforme des retraites.
©Loic VENANCE / AFP

Réforme déconfinée

La réforme des retraites, en suspend depuis le début de la crise sanitaire, ne pourra pas « être reprise en l’état », a prévenu Emmanuel Macron. Sans donner de précisions sur les contours d'un éventuel nouveau projet de réforme.

Sébastien Laye

Sébastien Laye

Sebastien Laye est chef d'entreprise et économiste (Fondation Concorde).

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Emmanuel Macron a déclaré qu’il ne pensait pas que la réforme des retraites puisse être « reprise en l'état », évoquant des « inquiétudes » autour du texte. Est-ce une façon d’avouer que ce texte est plus guidé par l’opinion que par la rationalité ?

Sébastien Laye : Il s'agit surtout d'avouer- enfin- que sa promesse de 2017, certes vague, d'un big bang des retraites avec la mise en place d'un système de retraites par points, était irréaliste et inenvisageable. Simple slogan de campagne (deux lignes dans le programme actuel), il a été repris par Edouard Philippe, quand fut porté sur les fonts baptismaux cette réforme, comme un prétexte pour aligner les différentes caisses, et puiser chez les vertueux pour tenter de rétablir l'équilibre financier de l'ensemble. Justification morale- tout le monde devrait etre logé à la même enseigne- ou budgétaire - allons chercher l'argent où il se trouve, comme par exemple chez la caisse des avocats, il n 'en demeure pas moins que jamais une réforme systémique des retraites n'a été présentée sous le quinquennat Macron. L'opposition syndicale au texte ne provenait bien sûr pas de ce point, mais des économies faites par la traditionnelle méthode du rabot en France. On s'est enivré de grands slogans pour une micro réforme purement comptable, qui n'a jamais eu la moindre chance de sauver nos retraites sur le moyen/long terme. Aujourd'hui, après l'interruption de cette réforme due au Covid, le véritable obstacle est plus politique : à un an de la présidentielle, il paraît audacieux de relancer la réforme; mais en même temps, s'il ne fait rien, c'est en fini de l'image du Macron réformateur. Vous avez raison, nous sommes ici loin de toute rationalité économique.

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Si Emmanuel Macron décide d’une réforme au rabais, ne risque-t-on pas de perdre l’intérêt intrinsèque du projet de base ? Vers quoi se dirige le président ?

Je crains de mettre en jeu un peu de ma crédibilité ici en vous affirmant que nous ne perdons pas grand chose vu ce que je viens de dire sur la coquille vide du texte initial... et que de toute façon, Macron va pratiquer son oxymore habituel. D'un côté, la grande et bien vague réforme par points sera abandonnée ou repoussée à un second mandat ; mais afin de pouvoir continuer à pérorer sur le thème éculé "je suis un président réformateur pas comme les autres" et donner des gages aux milieux d'affaires le soutenant toujours, Macron va modifier certains paramètres du système : alignement de certaines caisses, peut etre un léger recul de l'âge de départ en retraites pour certains. Le système des retraites ne sera pas sauvé mais il pourra dire qu'il a tout tenté ; comme les dix gouvernements avant celui-ci qui se sont attaqués au sujet.

Vu l’état actuel de l’économie, quelle réforme des retraites serait la meilleure et la plus viable ?

Un système de retraites par points serait irréaliste et sans intérêt. Les réformes traditionnelles des retraites menées en France, plutôt par la droite, sont dites paramétriques: on touche certaines variables, comme l'âge de départ à la retraite, ou on demande aux français de cotiser plus, on pourrait aussi rouvrir le dossier du montant des pensions. Ces approches sont en train de crouler sous les déséquilibres financiers du régime et la volonté d'autonomie des plus jeunes et des indépendants, qui ne se sentent plus liés par le système de retraite par répartition. Il faut rappeler que ces déséquilibres financiers n'existent pas que du fait de la démographie, mais surtout à cause du chômage car nous n'avons pas assez de cotisants par rapport aux retraités. Avec un chômage en permanence vers 6%, la question des retraites ne se poserait pas. En attendant, et pour sauver le système mais aussi la conception du travail pour les jeunes, il faut à côté de notre socle de répartition, développer la capitalisation: nous venons par exemple de passer à côté d'un fabuleux cycle de création de valeur dans les start up et la Bourse qui auraient pu renflouer nos caisses de retraite. Les indépendants en particulier, doivent avoir le choix, et pouvoir décider de moins cotiser dans le système de retraite par répartition et investir leur épargne dans une partie de retraite par capitalisation. L'Etat doit se désengager de la gestion des systèmes de retraite des non fonctionnaires.

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