Contrôle des chômeurs : le nouveau dispositif peut-il être efficace ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le nouveau dispositif introduit une instance de contrôle chargée de documenter les activités de recherche d’emploi du chômeur.
Le nouveau dispositif introduit une instance de contrôle chargée de documenter les activités de recherche d’emploi du chômeur.
©Reuters

Recette miracle

Pôle emploi a démarré en début de semaine son nouveau dispositif de contrôle des chômeurs en déployant 200 agents chargés de vérifier que les demandeurs d'emploi sont bien en recherche active. L'objectif est clair : contribuer à inverser la courbe du chômage.

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul est économiste et professeur à l'université Toulouse I.

Il est l'auteur du rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) intitulé Immigration, qualifications et marché du travail sur l'impact économique de l'immigration en 2009.

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Atlantico : Quelles sont les étapes de ce contrôle, et les sanctions infligées en cas de non-respect du processus ? Qui vise-t-il principalement ?

Gilles Saint-Paul : Le nouveau dispositif introduit une instance de contrôle chargée de documenter les activités de recherche d’emploi du chômeur. Si le contrôleur considère qu’elles sont inadéquates, il peut lui demander des informations supplémentaires et procéder à sa radiation. Cette radiation peut avoir une durée comprise entre quinze jours et six mois. La radiation a des conséquences financières puisqu’elle se traduit par une perte d’indemnisation. 

Ces mesures s’inscrivent dans le cadre de recommandations « orthodoxes » ou encore « social-libérales » dont l’esprit général est de concilier un état providence généreux avec un niveau d’incitation économique élevée. Elles s’inspirent du « modèle scandinave », et notamment de la « flexicurité » à la danoise. L’idée est de consacrer des ressources au suivi des chômeurs pour éviter qu’ils n’emploient des stratégies opportunistes consistant à profiter d’un taux d’indemnisation élevé en ayant une faible activité de recherche d’emploi. L’enjeu c’est de réduire la durée du chômage, la proportion de chômeurs de longue durée, et d’accroître l’effet modérateur des chômeurs sur les salaires. 

Dans quelles mesures ce nouveau dispositif peut-il être efficace ? Peut-il contribuer à diminuer le chômage ?  La nature financière des sanctions peut-elle être une incitation ?

Ce dispositif peut être efficace s’il est mis en œuvre sérieusement. Il a le mérite d’imposer des sanctions réelles aux chômeurs dont l’activité  de recherche serait insuffisante, et de résoudre les conflits d’intérêts au niveau des employés de pôle emploi en dissociant suivi et contrôle. Son évaluation a fait l’objet d’un traitement expérimental qui suggère que sa mise en œuvre pourrait faire baisser le chômage d’environ un point. Avec cette réforme, le gouvernement s’inscrit clairement dans l’orthodoxie prônée par les institutions internationales comme l’OCDE, bien que celles-ci soient régulièrement taxées de « néo-libéralisme ». 

Quelles sont les principales désincitations qui existent aujourd'hui dans les procédures de Pôle Emploi et qui empêchent un retour de certains chômeurs vers l'activité professionnelle ? Le nouveau dispositif va t-il permettre de les endiguer ?

Depuis le PARE en 2001, qui remplaçait la dégressivité au cours du temps des allocations par un suivi plus intense des chômeurs, suivi qui ne s’est pas réellement matérialisé, les autorités tentent d’améliorer le contrôle des chômeurs, puisque l’effet incitatif de la dégressivité n’est plus présent. Le dispositif qui vient d’être introduit est bien conçu sur le papier et devrait conduire à une baisse du chômage, mais le risque qu’il reste lettre morte, comme avant lui le volet incitatif du PARE, subsiste cependant.

Les syndicats et les chômeurs y voient surtout une volonté de faire baisser les mauvais chiffres du chômage en augmentant temporairement le nombre de radiations administratives. Peut-on s'attendre à une amélioration des pratiques pour le suivi de ces derniers ou doit-on craindre des radiations massives et un abaissement artificiel des chiffres du chômage ?

Il importe peu que les visées du gouvernement soient cyniques ou pas. S’il est établi que les chômeurs radiés ne cherchent pas activement un emploi, il est légitime de les radier, car leur situation ne correspond pas à la définition d’un chômeur ni aux conditions d’obtention d’une indemnisation. Outre l’effet purement comptable des radiations, on s’attend, si la mise en œuvre du dispositif est efficace, à ce que les chômeurs cherchent plus activement du travail, et refusent moins d’offres, afin d’éviter d’être radiés. C’est cet effet qui devrait améliorer la résilience du marché du travail en rendant les salaires plus réactifs au chômage ; on s’attend à la fois à une baisse du taux moyen de chômage à long terme et à une meilleure réaction de l’économie aux chocs macroéconomiques. Cependant, pour que l’on puisse profiter de ces derniers effets, il est crucial que le dispositif soit durable et perçu comme tel par les agents économiques. 

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