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Cette photo prise le 29 décembre 2022 montre un agent de santé administrant une dose de vaccin inhalable CanSino Biologics contre la Covid-19 à Bijie, dans la province chinoise du Guizhou, en Chine.
Cette photo prise le 29 décembre 2022 montre un agent de santé administrant une dose de vaccin inhalable CanSino Biologics contre la Covid-19 à Bijie, dans la province chinoise du Guizhou, en Chine.
©STR / AFP

Anticipations 2023

De nombreux pays, dont la France, ont décidé de prendre des mesures vis-à-vis des voyageurs en provenance de Chine face à la forte hausse des contaminations après l’abandon de la stratégie du zéro Covid. Le système de santé chinois va-t-il s’effondrer ? De nouveaux variants vont-ils apparaître ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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En ces jours, où nous nous souhaitons des vœux de bonheur et de bonne santé, nous prenons parfois de bonnes résolutions. Je vais vous en proposer quelques-unes ici, pas si difficiles à tenir. Question de volonté. Nous scrutons l’avenir que nous voudrions plus paisible et plus radieux, n’est-ce pas. Nous nous demandons ce que sera 2023, après les calamités endurées de 2022. La guerre de la Russie à l’Ukraine cessera-t-elle enfin ? Le Covid marquera-t-il enfin le pas, après trois années de force et de rage ? Je ne saurai me prononcer sur la première question, mais je voudrais vous parler de la seconde.

L’un des tournants majeurs de cette pandémie aura certainement été la décision prise le 7 décembre dernier par les autorités chinoises de sortir de leur politique zéro Covid. Tout le monde aurait dû se réjouir de cette décision, le peuple chinois en premier, tellement cette politique virait à un entêtement absurde du gouvernement chinois depuis quelques mois, alors que le reste du monde reprenait petit à petit à revivre comme avant. Nous disposions de vaccins, certes imparfaits, mais qui avaient réussi à nous sortir des méthodes moyenâgeuses que presque seuls, les Chinois continuaient à s’infliger. C’est à la faveur de sous-variants d’Omicron encore un peu plus transmissibles que les précédents, que les digues ont fini par lâcher, les unes après les autres. Le gouvernement de Pékin a dû renoncer à sa politique devenue intenable. Muré dans sa certitude de détenir la clé de la riposte à cette pandémie, avec la stratégie zéro Covid, il semble qu’il n’ait seulement pas envisagé de scénario de sortie. Envisageait-il la politique zéro Covid pour l’éternité ? C’est presqu’à se le demander. Pourtant de nombreux experts occidentaux alertaient, soulignant la très grande transmissibilité d’Omicron qui rendait cette stratégie intenable sur le long terme et indiquant que les autorités chinoises se devaient de se préparer à ce que les digues craquent un jour ou l’autre. Le problème est qu’il semble que rien n’ait été anticipé par le gouvernement chinois qui semble avoir perdu aujourd’hui le contrôle sur la situation épidémiologique, improvisant des mesures désormais au gré de nouvelles qu’il égrène. Ces mesures, paradoxalement, vont toutes dans le sens d’une levée des restrictions, la dernière en date étant celle des voyages de ses ressortissants hors des frontières, alors que la situation décrite par les différentes sources officielles ou non se recoupent pour évoquer une vague d’une ampleur sans précédent, d’un système de santé à la limite de la saturation et d’une mortalité qui semble s’envoler.

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L’année 2023 pourrait donc bien être - à nouveau, après 2020 - l’année de la Chine. Le pays arrivera-t-il à reprendre rapidement la barre du navire qui tangue dans la tempête, secoué par des vagues pandémiques devenant de véritables déferlantes ? Ou au contraire, verra-t-il son système de santé s’effondrer et son système économique et social sombrer dans la paralysie, en raison de l’absentéisme, de la colère ou de la révolte ? Tous les scénarios sont sur la table même si le plus souvent, on sait qu’aucun de ceux que l’on envisage ne se réalisera.

Comment imaginer que la circulation du coronavirus parmi un milliard quatre cents millions de personnes, ne conduise pas à l’émergence de nouveaux variants ? Seront-ils des sous-variants d’Omicron venant nourrir la « soupe » des plus de cinq cents sous-variants déjà répertoriés dans le monde ? Ou bien émergera-t-il en 2023 un ou plusieurs variants que l’OMS baptisera de nouvelles lettres de l’alphabet grec ? On le saura prochainement, et cela ne nous renseignera pas immédiatement sur les caractéristiques de ces nouveaux variants. Jusqu’à présent, on a connu des variants certes toujours plus transmissibles, échappant largement à l’immunité collective en matière d’infection et de transmission. Mais notre immunité hybride, celle constituée de nos vaccinations multiples mais aussi de nos infections répétées par le SARS-CoV-2, nous a permis de réduire substantiellement les risques de formes graves de Covid dans nos populations. Nous avons su ainsi éviter la saturation de nos hôpitaux, réduire le risque de mortalité. Qu’en sera-t-il des variants du cru 2023 ? Nous ne pouvons pas le prévoir en ce début d’année.

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Saurons-nous cependant tirer les quelques leçons utiles pour anticiper de nouvelles tempêtes pandémiques de Covid, à défaut de savoir les prévoir ? Nous savons en effet que le coronavirus se transmet quasi-exclusivement par voie aérosol. Ainsi, nous pourrions limiter grandement les risques de transmission de tous les variants, quels que soient leur niveau de transmissibilité et leur virulence, en nous attaquant à réduire les risques de contamination. Nous savons que le coronavirus ne se transmet quasiment qu’en lieux clos, bondés et mal ventilés. Nous pourrions chercher à améliorer la qualité de l’air intérieur que nous respirons. Nous savons qu’au-dessous d’une concentration de 600 ppm de CO2 nous ne risquons quasiment pas de nous faire infecter par le SARS-CoV-2. Nous ne risquons plus de contracter le COVID-19, ni de développer de formes graves, ni des Covid longs. Ne serait-il pas tentant de ne plus courir ces risques inutilement en 2023 ? Nous savons qu’au-delà de 1000 ppm de CO2 dans une pièce où l’on reste plusieurs minutes, ou dans un wagon, il vaudrait mieux porter un masque, notamment de type FFP2 en période de forte circulation du virus dans la communauté. Nous savons aussi que ces mesures - ventilation et port du masque - sont également très efficaces contre la grippe et les autres virus respiratoires, saurons-nous profiter de toutes ces connaissances nouvelles accumulées grâce à la pandémie de Covid-19 ?

Si nous savons tirer les quelques leçons de cette pandémie, si nous acceptons d’investir massivement dans une rénovation du bâtiment pour rendre l’air intérieur d’une qualité microbiologique voisine de celle de l’air de la rue, si nous savons porter le masque lorsque la situation l’exige, si nous testons les voyageurs en provenance de territoires où déferlent de fortes vagues, alors nous tiendrons nos destins en mains. Alors nous contrôlerons l’émergence de nouveaux variants, qu’ils soient plus transmissibles ou plus virulents. Cela a un coût bien sûr, mais à ce prix nous pourrons revenir à une vie plus paisible et débarrassée des menaces de cette pandémie. Nous permettrons auxplus vulnérables d’entre nous de ne plus redouter de développer des formes compliquées et mortelles du Covid ou de la grippe. Nous aurons de nouvelles clés pour réduire les risques de Covid longs et toutes les manifestations post-infectieuses de ces virus respiratoires.

Bonne année et bonne santé à tous …dès 2023 !

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