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"Paula" :  la trajectoire courte et quasi secrète d'un Van Gogh au féminin
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François Quenin pour Culture-Tops

François Quenin pour Culture-Tops

François Quenin est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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CINEMA
Paula
De Christian Schwochow
Avec Carla Juri, Albrecht Abraham Schuch, Roxane Duran, Joel Basman, Stanley Weber
LE REALISATEUR
Agé de 38 ans, le cinéaste allemand Christian Schwochow, né à Bergen, a étudié la mise en scène à l’Académie de cinéma de Bade-Wurtemberg. Il a réalisé "L’invisible" en 2011 et surtout "De l’autre coté du mur" en 2014. Adapté du roman de Julia Franck, ce film raconte l’itinéraire d’une femme et de sa fille qui fuient l’Allemagne de l’Est dans les années 1950 pour se réfugier à l’Ouest et le parcours du combattant qu’il faut accomplir pour être intégré à l’Ouest. C’est un film au réalisme romanesque quasiment vécu par le réalisateur qui est passé lui aussi de l’Est à l’Ouest avec sa famille. Il poursuit, dans sa nouvelle réalisation, "Paula", l’exploration de l’histoire allemande dans le même style, séduisant, précis et empathique.
THEME
À vingt ans, Paula Becker (1876-1907), interprétée par la belle Carla Juri, ne rêve que de peinture. Soutenue par son père, elle intègre la petite communauté d’artistes vivant dans le village de Worpswede, non loin de Brême. Elle épouse l’une des figures du groupe, le peintre Otto Modersohn qui a quatorze ans de plus qu’elle. Et elle se consacre à son art dans le magnifique paysage de cette région d’Allemagne du nord.
Mais bientôt cet endroit paradisiaque ne lui suffit plus. Elle rêve de Paris où se joue toute la peinture moderne. Elle y fait plusieurs séjours à partir de 1900 et prend connaissance des travaux de Gauguin et de Cézanne qui la fascine. Elle a l’intuition que Cézanne est le plus grand de tous : "Il est l’un des trois ou quatre grands maîtres qui eurent sur moi l’effet d’une tempête", écrit-elle dans sa correspondance.
Mais la tranquillité de Worpswede lui manque. Elle y rejoint son mari et elle meurt à 31 ans d’une embolie après avoir donné naissance à une petite fille et peint des milliers de tableaux.
POINTS FORTS
"Paula" raconte une femme exceptionnelle, un Van Gogh au féminin, qui a passé sa courte vie à douter et à construire une œuvre d’une belle originalité, à peine reconnue de son temps -elle a vendu dans sa vie quatre tableaux- et célébrée depuis comme la première femme peintre dans le monde, et, de plus, précurseur de l’art moderne en Europe.
Si elle a peint beaucoup de visages ainsi que des portraits d’hommes, de femmes, d’enfants, tous issus d’une paysannerie misérable survivant dans les fermes autour de Worpswede, elle a aussi capté la campagne environnante, en toutes saisons, et le cinéaste de ce film rayonnant l’a filmé à son tour comme un peintre, avec une proximité qui n’enlève rien à son attrait et à ses mystères.
Elle doutait énormément d’elle, ne montrant ses œuvres que chichement. Son mari a découvert l’étendue de son talent lors d’un séjour à Paris. Même chose pour l’une de ses relations parisiennes qui l’a forcée à lui montrer ses œuvres : il fut ébloui.
La comédienne allemande qui l’interprète, Carla Juri, épouse la fougue et l’anticonformisme de son personnage. Née en Suisse, à Locarno, en 1985, elle a tourné dans une vingtaine de films suisses, italiens et allemands, après avoir suivi les cours d'une école d’art dramatique à Los Angeles. On la verra bientôt aux côtés d’Harrison Ford et de Ryan Gosling dans "Blade Runner 2".
POINTS FAIBLES
C’est une gageure de raconter au cinéma la vie et le travail d’un peintre. Maurice Pialat s’y était essayé avec Van Gogh, plus récemment Danièle Thompson a ressuscité Cézanne. Sans doute le personnage de Paula a-t-il été moins séduisant et cinématographique que le montre le film. Le cinéma l’embellit, c’est peut-être un point faible pour le réalisme de la trajectoire de Paula, c'est cependant positif pour le spectateur.
EN DEUX MOTS
Très connue en Allemagne, Paula Becker-Modersohn a fait l’an dernier l’objet d’une vaste exposition au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris. Dès 1927, un musée a été érigé à Brême pour contenir l’ensemble de son œuvre. Conçu par l’architecte Bernhard Hoetger, le bâtiment est aujourd’hui considéré comme un chef d’œuvre de l’architecture expressionniste en Allemagne.
UN EXTRAIT
Ou plutôt deux:
- "Dans ma profession, il y a encore bien peu de réalisatrices. Les vieux peintres de Worpswede le proclamaient : une femme ne peut pas créer de l’art, seulement des enfants. Paula était moderne dans la mesure où elle se fichait de ce genre d’injonction." Christian Schwochow
 - "Je sais que je ne vivrai pas très longtemps. Mais est-ce si triste ? Ma vie est une fête courte et intense. Et si l’amour me fleurit encore un peu avant de s’envoler, et me fait réaliser trois bonnes peintures dans ma vie, je partirai volontiers, des fleurs aux mains et aux cheveux". Paula Becker-Modersohn
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