Des vies en suspens : le difficile quotidien des proches de personnes réduites à un état végétatif<!-- --> | Atlantico.fr
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Le quotidien de l'entourage de personnes réduites à un état végétatif est extrêmement difficile à supporter.
Le quotidien de l'entourage de personnes réduites à un état végétatif est extrêmement difficile à supporter.
©Reuters

Au-delà du cas Vincent Lambert

Le quotidien de l'entourage de personnes réduites à un état végétatif est extrêmement difficile à supporter. Le plus souvent dans ce genre de cas, les proches essaient d'entrer en communication par tous les moyens avec la victime.

Philippe Azouvi

Philippe Azouvi

Philippe Azouvi est professeur de médecine physique et de réadaptation. 

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Atlantico : Suite aux polémiques qui entourent le sort de Vincent Lambert, le débat sur la fin de vie et la situation des personnes en état végétatif revient sur le devant de la scène. Mais qu'en est-il de leurs proches ? Quelles sont les réactions les plus communes des proches ?

Philippe Azouvi : Ce type de situation est très difficile à vivre pour les proches. Le blessé est vivant mais a perdu ses capacités de communication. Le plus souvent, les proches essaient de rentrer en communication par tous les moyens (contact physique, verbal, musiques, photos...).  Il arrive très fréquemment que les proches détectent ainsi avant le personnel soignant certains petits signes de récupération. Certaines familles peuvent au contraire réagir en se détachant progressivement, mais c'est en fait rare.

Lorsqu'un proche est dans un état végétatif, sa famille fait généralement l'objet d'un suivi. Comment accompagner les individus qui se retrouvent face à ce type de situations ? 

L'accompagnement repose d'abord sur des échanges et des informations régulières entre la famille et le personnel soignant. Il est très important de bien expliquer la différence entre des mouvements réflexes involontaires et les premiers signes de récupération de la conscience. Il faut aussi les écouter car ce sont souvent eux qui détectent les premiers signes de récupération. Il est aussi proposé aux proches de rencontrer la psychologue du service s'ils le souhaitent. Il est parfois difficile de répondre aux questions qu'ils se posent du fait de l'incertitude fréquente sur le pronostic.

Comment se préparer à la possible perte d'un être cher quand rien n'est établi ? 

Il m'est difficile de répondre précisément. Je dirais simplement que, le plus souvent les proches, passée la phase aiguë ne sont pas dans une démarche de deuil mais plutôt d'espoir de récupération. Il est en fait rare que les proches demandent l'arrêt des soins (du moins après la phase aiguë), en général la demande est plutôt une intensification de la prise en charge, même si cela parait parfois peu utile aux professionnels, ce qui peut déboucher sur des incompréhensions. La problématique de l'arrêt des soins se pose en fait principalement à la phase aiguë, en service de réanimation, et non quand l'état est devenu chronique, en rééducation. C'est d'ailleurs pour cela qu'ont été créées des unités spécifiques pour la prise en charge au long cours de patients en état de conscience altérée. Certaines familles finissent parfois par se détacher avec le temps mais cela peut prendre beaucoup de temps, et n'a rien d'obligatoire, au contraire. Le rôle des professionnels est aussi de les accompagner dans ce cheminement sans les culpabiliser.

La société d'aujourd'hui étant une société matérialiste comment gérer les problématiques qui entourent la mort ? 

Il faut aussi savoir que les idées que l'on peut avoir a priori, quand on est soi-même en bonne santé, ne reflètent pas nécessairement le point de vue des personnes qui se trouvent en situation de handicap. Ainsi, certaines études ont montré que des patients très lourdement handicapé (par exemple après un syndrome dit de "locked-in", de paralysie totale des 4 membres et du visage, mais conscients par ailleurs), n'expriment que rarement la volonté de mourir et peuvent même rapporter une satisfaction de vie proche de celle de sujets sains. Il peut ainsi exister de grandes discordances entre ce que peuvent penser et dire des personnes en bonne santé ("je préférerais être mort que dans tel ou tel état") et ce que pensent et expriment des personnes qui se trouvent concrètement dans une telle situation, et qui le plus souvent demandent à continuer à vivre. Mais bien entendu il peut exister de grandes variations d'un individu à un autre.

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