Comment la Suède s’est transformée en usine à tubes pop… grâce à une décision politique<!-- --> | Atlantico.fr
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Kylie Minogue reprend une chanson d'Abba.
Kylie Minogue reprend une chanson d'Abba.
©Reuters

Abbattitude

Abba certes, mais aussi Ace of Base ou Roxette, la musique pop suédoise s'exporte bien, si bien que le pays en est le 3ème exportateur mondial.

Gunilla  Norén

Gunilla Norén

Gunilla Norén est organisatrice du festival ÅÄÖ, festival de musiques actuelles suédoises, et chargée de mission musique à l’Institut suédois

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Atlantico : Officiellement troisième exportateur de musique mondial (chiffres de la chambre de commerce américano-suédoise) après les États-Unis et l’Angleterre, la Suède tient une place primordiale dans l’industrie musicale internationale. Avec des groupes comme Abba, Europe ou Ace of Base, le genre pop s’est imposé comme une signature suédoise. Comment expliquer la place dominante de la pop musique suédoise aujourd’hui? Depuis quand se diffuse-t-elle ?

Gunilla Norén : Plusieurs raisons expliquent cette domination. La musique a une place importante dans la culture suédoise, elle est très populaire, on la trouve dans toutes les couches de la société. Par exemple, on la retrouve sous la forme des cours d’instrument, il existe des écoles municipales qui en proposent à très bas prix. Une grande majorité des enfants apprennent un instrument, même s'ils ne deviennent pas tous des Mozart, ils apprennent le solfège, la musique. En Suède, nous avons un apprentissage parallèle, nous n’apprenons pas le solfège puis un instrument comme en France, mais de façon moins classique nous apprenons les deux en même temps, et nous sommes confrontés à plusieurs instruments. Notre apprentissage est plus axé sur le plaisir. Cette première rencontre avec la musique est l’une des raisons pour lesquelles les Suédois sont très sensibles à la musique. Par ailleurs, à cet apprentissage se rajoute une tradition de la chanson. Il y a beaucoup de chorales, qui chantent à Noël, à Pâques, et à chaque fin d’année se déroule un spectacle final. Bien que persiste un cadre solennel, avec des chansons pour accueillir l’été ou le jour de la Saint Jean, les jeunes Suédois aiment chanter de la pop musique : les Beatles, Abba… Si cet apprentissage de la musique n’explique pas de fait la domination de la pop musicale sur le monde, il explique pourquoi il y a autant d’artiste suédois dans ce domaine. La musique a une forte place dans la société. Je pense également, que nous n’avons que 9 millions d’habitants et beaucoup de petites villes où le choix de loisirs est très limité. The Hives avaient bien dit qu’ils n’avaient que deux choix étant jeunes, le foot ou la musique…

Par ailleurs, nous nous sommes familiarisés avec internet beaucoup plus tôt qu’en France, l’effervescence a eu lieu vers 1997. Les groupes suédois se sont inspiré rapidement des groupes internationaux via leurs connexions, d’où aujourd’hui la facilité de la diffusion de leur musique. Les Suédois sont très technophiles, ils peuvent s’autoproduire.

Enfin le rôle de l’anglais n’est pas à négliger. Les Suédois maîtrisent la langue de la promotion unique, ce qui facilite les choses. Mais nous savons surtout que nous sommes un petit pays, sans réel marché interne, donc pour vivre de son art, il faut s’exporter. Comme beaucoup de pays scandinaves, nous travaillons pour que les gens apprennent les langues, voyagent... La musique est l’un des exemples de l’exportation suédoise.

Quel rôle la déferlante Abba des années 1970 a-t-elle joué dans cet engouement ? Comment a-t-il ensuite évolué ?

Abba est plus reconnu dans d'autres pays qu’en suède. Les Suédois n’ont pas compris à quel point le succès d'Abba était grand, il suffit de constater la surprise des Suédois lorsque qu’a été annoncée la création du musée Abba, et devant le chiffre de fréquentation énorme des touristes. En Suède nous aimions de nombreux styles musicaux dans les années 1970, comme la musique progressiste, ou le jazz. La pop musique était à son apogée avec des groupes comme Roxette dans les années 1980, ou un groupe national, Gyllene Tider (les temps glorieux). Aujourd’hui beaucoup de groupes pop ont un grand succès comme Robyn, qui remplit des stades aux Etats-Unis, ou Lykke Li.

La musique pop suédoise a-t-elle des caractéristiques et une identité propres ? Quelles sont-elles ? 

Il est compliqué de répondre à cela dans un monde où tous les styles sont mélangés. Si l’on devait trouver quelques caractéristiques, je dirais que l'on donne beaucoup d’importance aux mélodies, où se mêle une sorte de mélancolie scandinave. Et les Suédois mettent aussi l’accent sur la production, à l’image d’Abba. Certain les critiquaient en les traitant de musique à soupe, mais si on analyse leurs succès, on voit bien qu’il vient directement de la production, qui est de grande qualité.

Comment s’organise l’industrie musicale suédoise ?

Comme partout il y a différentes entités, des organisations nationales et des organisations semi étatiques, comme Export Music Sweden, mais il n’y a pas beaucoup de subventions dans la promotion de la musique. On a longtemps considéré que la musique devait survivre seule, de façon commerciale. Mais cela change. Le ministère des affaires étrangères, qui sent qu’il y a un énorme potentiel au niveau export, met l'accent sur de domaine. Mais pas seulement, on reconnaît aujourd’hui l’importance, avec la musique, de quelques autres filières: le cinéma, la littérature, le gaming, ou encore la mode. Par ailleurs, les labels sont disséminés un peu partout en Suède, dans les grandes villes, et grâce à l’autopromotion les petits labels sont partout.

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