Bien des metteurs en scène devraient venir au Châtelet : ils comprendraient peut-être qu'on peut associer plaisir et talent, sans aucune prétention.
Nathalie Luquiens est chroniqueuse pour Culture-Tops.
L'histoire se passe à Sparte. Hélène est mariée au roi Ménélas. Malheureusement pour Ménélas, elle est la plus belle femme du monde. Heureusement pour Hélène, Vénus lui fait rencontrer le jeune Pâris, prince de Troie. Pâris enléve Hélène grâce à une ruse... La guerre de Troie, on le sait, c'est la faute à Hélène... et à la fatalité.
- Surprise : la scène est peinte en bleu roi ! Des silhouettes bleues s'agitent... et brandissent des lettres blanches, qui petit à petit forment le générique !
- Le ton est donné : Héléne implore Vénus : "Il nous faut de l'amour"... Les pleureuses : "Ce n'est pas une cocotte, c'est une reine!". Réponse de la reine : "Est-ce ma faute à moi si je suis la fille d'un oiseau ?" C'est fou... Adieu les bons rois, le courage, la fidélité, l'amour. Bonjour la ruse, l'impertinence, la folie et le burlesque. Les héros de l'Illiade sont tournés en ridicule, et c'est très drôle.
- La mise en scène est soutenue par une vidéographie exceptionnelle : un film d'animation est réalisé en direct, sous les yeux des spectateurs. Sur le fond de scène bleu sont incrustées des images tournées, en direct donc, par de minuscules caméras. Surprenant. Incroyable.
- Les idées de mise en scéne soulignent la folie du livret de cet opéra: la fameuse présentation des rois de Grèce se fait d'un balcon, avec micro ; le concours de joute verbale est un jeu TV... Ménélas part en avion, Pâris en moto... Quant à la scène du rêve d'Hélène, elle est d'une réelle beauté.
- Les artistes sont au diapason : Gaelle Arquez incarne une très belle et amusante Hélène. Merto Sungu est Pâris : un ténor comique au physique d'anti-héros. L'Orchestre semble prendre autant de plaisir que nous : les cornets à piston et les percussions s'en donnent à coeur joie... Ils rythment flonflons et tintamarres. Attention ! Offenbach admirait beaucoup Mozart et Rossini. On l'appelait d'ailleurs "Le Mozart des Champs Elysées".
Je n'en vois vraiment pas.
Deux phrases d'Offenbach illustraient bien son état d'esprit :
- "Mon rêve a toujours été de fonder une compagnie d'assurances mutuelles contre l'ennui".
- "Je ne sais vraiment pas ce que j'ai pu faire au Bon Dieu pour qu'il m'ait comblé de tant de joie et de tant de musique".
Venez vérifier si le parfum de scandale qui a entouré la création de cet opéra est toujours d'actualité... La dérision est-elle la meilleure façon de traiter le déclenchement des guerres ? Une suggestion : prenez un peu de temps avant. Le bar du 2eme étage donne sur Notre Dame, la Sainte Chapelle et la Tour Saint Jacques.
En sortant, je pensais au mot de Pagnol : "méfiez-vous des gens tristes, ils sont rarement sérieux"... Bonne soirée !
En priorité
Un Offenbach plus champagne que jamais.
Suivre @culturetops sur Twitter
Opéra-bouffe. "La Belle Hélène", de Jacques Offenbach. Théâtre musical du Châtelet. Mise en scène, scénographie et video : Giorgio Barberio Corsetti et Pierrick Sorin. Direction musicale : Lorenzo Viotti.
Théâtre du Châtelet, 2 rue Edouard Colonne, 75001 Paris. Jusqu'au 22 juin. Réservation: 0140282840. (chatelet-theatre.com).
En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.
Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !