Pour redresser l’économie, Zemmour reprend la méthode Chirac « ma démagogie vous surprendra »<!-- --> | Atlantico.fr
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Eric Zemmour prononce un discours lors de son premier grand meeting à Villepinte, le 5 décembre 2021. Il a dévoilé de nombreuses mesures de son programme, notamment sur l'économie.
Eric Zemmour prononce un discours lors de son premier grand meeting à Villepinte, le 5 décembre 2021. Il a dévoilé de nombreuses mesures de son programme, notamment sur l'économie.
©STEFANO RELLANDINI / AFP

Atlantico Business

Zemmour continue de faire du Zemmour. Il veut sauver la France de l’Islam d’un côté et restaurer la puissance économique de l’autre, mais il ne dit pas comment. Sauver l’identité et l‘image de la France oui, mais restaurer la puissance économique, ce serait mieux.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Eric Zemmour est devenu un candidat comme les autres ou presque. Il cite Chirac comme pour mieux s’en inspirer, sauf que c’est pour définir son programme :  « ma démagogie vous surprendra». Donc il promet des réformes parce qu’il le veut, mais ne dit pas s’il le peut et surtout comment il le pourra. Notamment sur les questions économiques qu’il résout avec beaucoup de démagogie.

Les chefs d’entreprise, et plus largement l’ensemble des acteurs du monde du monde des affaires, n’ont toujours pas compris comment Éric Zemmour pourrait redresser le système économique et le mettre en capacité d’affronter la concurrence internationale.

Devenu candidat officiel à la présidence de la République, Éric Zemmour a évidemment rassemblé ses militants sur la nécessité de renforcer l’identité de la France et de la sauver des « envahisseurs », mais il n’a toujours pas avancé sur un programme de renforcement de l’économie.

Or, féru d’histoire qu’il est, admirateur de Napoléon qu’il a encore cité à Villepinte, il devrait savoir que Napoléon a été éliminé de la grande Histoire de France parce qu’il n’avait pas assuré ses arrières et qu’à la fin, il n’avait même plus de quoi payer « la solde de ses  grognards ».

Dans le cadre de son discours fondateur de Villepinte, Eric Zemmour a certes essayé de répondre aux bruits de la ville qui réclament depuis quelques semaines des réponses au « comment faire sur le terrain économique », mais il est reste très succinct. Il n’a guère progressé depuis le jour où il était reçu par les adhérents du mouvement patronal Ethic et où la présidente Sophie de Menthon a osé lui demander de répondre précisément aux questions des chefs d’entreprise. Elle s’est entendue répondre, en gros, que le rôle du président de la République n’était pas d’être expert-comptable.

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A Villepinte, Eric Zemmour a bien essayé de descendre au niveau de l’intendance en promettant de redonner de l’oxygène au monde du travail, mais il n’a pas dit qui paierait l’oxygène.  Il n’a même pas prouvé aux rares chefs d’entreprise présents qu’il savait compter. Si l’axe majeur de son projet est de restaurer l’identité française, son image, ses valeurs, son histoire, cette ambition mériterait au moins qu’on dise aux chefs d’entreprise quels seront l’environnement et l’écosystème dans lesquels ils pourront fonctionner, parce que « le sauvetage de la France », pour reprendre son expression, aura besoin de création de richesses.

Donc besoin de créateurs et ce que le monde de l’entreprise a besoin aujourd’hui, c’est de visibilité et de stabilité dans toutes les composantes qui interfèrent sur l’activité : le fiscal,  le social, le normatif, l’international.

Le monde des affaires a besoin d’une vision d’ensemble à moyen terme sur la place de l’entreprise par rapport à l’Etat, sur la place et le rôle de l’Europe et sur le mode de relation avec le reste du monde où s’exerce désormais une concurrence incontournable.

Éric Zemmour n’a toujours pas de programme global, il reprend un certain nombre de propositions en matières économiques qu’il a déjà égrenées. Si, sur le plan sociétal et notamment migratoire, il renverse la table. Au niveau économique, ses projets reviennent simplement à enlever la poussière pour la glisser sous les tapis.

La mesure phare de son programme est de proposer de tailler dans les dépenses sociales, en retirant aux étrangers l’accès aux aides d’assistance : RSA, APL, Minimum vieillesse, allocations familiales, aide médicale d’urgence. Cette proposition est cohérente avec sa politique de contrôle migratoire. Ceci dit, s’il réussit à contrôler les passages aux frontières comme il le promet, la question des aides sociales non-contributives sera résolue de fait puisque par définition, les bénéficiaires sont appelés à disparaître. Sauf qu‘il ne donne pas le mode opératoire.

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En bref, si le pays choisit d’installer une politique migratoire choisie, les fraudes à l’aide sociale et les dérives tomberont de fait. Or, l’immigration choisie est évidemment le modèle vers lequel tous les partis politiques vont finir par se tourner, sauf peut-être la France Insoumise et encore.

Éric Zemmour veut baisser la CSG sur les bas salaires, personne ne s’y opposerait, sauf qu’il faut l’appliquer de façon cohérente, c’est à dire prévoir une baisse des dépenses correspondantes ou des recettes alternatives.

Toujours du côté fiscal, Zemmour veut supprimer les impôts de production, exactement comme tout le monde, mais ne dit pas comment il finance cette suppression.

Augmenter l’âge légal de la retraite, c’est déjà ce qui se passe dans la réalité pour ceux qui ont du travail, et c’est une décision sur laquelle tout le monde (sauf les extrémistes de droite comme de gauche) est à peu près d’accord sans oser l’appliquer.

Éric Zemmour propose de supprimer la redevance audiovisuelle, ce qui supposerait de fermer ou de privatiser le service public (ce qu’il ne dit pas) ou alors de fiscaliser les budgets (ce qui ne change rien).

Pour terminer, Éric Zemmour ne manque pas supplier l’appareil économique de produire français. Et là encore, tout le monde sera d’accord à droite comme à gauche. Mais la supplique ne suffira pas. On ne produira français que si et seulement si le consommateur achète français. Et ce couple infernal, au cœur des mécanismes de marché que forment le client et son fournisseur, ne répond qu’aux obligations, aux interdits, aux incitations et aux intérêts réciproques. Visiblement, Éric Zemmour n’aime pas le marché mais il ne dit pas par quoi il espère le remplacer. Et pour cause. Ca paraît difficile.

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Cerise sur le gâteau, Éric Zemmour a compris que le nucléaire allait revenir en grâce. Il aurait pu annoncer publiquement son ambition de renforcer la part du nucléaire, ce à quoi les autres partis ne s’opposeront pas, dans la mesure où les décisions de redémarrer les programmes d’équipement ont déjà été prises et il faudra reconnaître que Emmanuel Macron est le premier responsable à avoir pris la décision et l’avoir rendue publique.

Éric Zemmour ne prendra pas de risque politique avec le nucléaire. Il ne fera aucune déclaration intempestive dans un sens ou dans l’autre.  

C’est dans l’ADN du gaullisme auquel il se réfère. C’est évidemment le seul moyen de répondre aux besoins considérables en électricité si on veut freiner les rejets de gaz à effets de serre. En plus, c’était dans les recommandations du dernier rapport du Giec. C’était écrit en tout petit, peu de gens l’ont lu et ceux qui l’ont vu se sont bien gardés de le dire.

Mais Zemmour aurait peu de mérite à militer pour une relance du nucléaire.  La pédagogie a été entamée, la prise de conscience est en train de progresser grâce à l’expertise de nos ingénieurs, aux excès ridicules des écologistes radicaux, mais surtout grâce à la formidable demande en énergie électrique propre des consommateurs qui sont aussi et surtout des électeurs.

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